Clinitex - Créer un management inspiré des principes de Montessori
Billet du futur #120 : L’exemple à suivre en France sur l’autonomie, la confiance et le bonheur des salariés
Bienvenue dans cette nouvelle édition du billet du futur ! Ça fait maintenant 5 ans que j’explore les meilleures pratiques du Futur du Travail, et cette newsletter est le meilleur moyen de découvrir mes apprentissages en avant-première.
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Bonne lecture,
Sam
Une entreprise pas comme les autres
J’ai trois questions pour vous :
Comment ne pas céder à l’envie de mettre en place du contrôle pour tout un groupe, quand un élément perturbateur vient de trahir votre confiance ?
Peut-on s’épanouir dans tous les métiers ?
Comment remettre l’humain au cœur des décisions de l’entreprise, sans galvauder l’expression ?
Trois questions pas évidentes car elles demandent de la nuance, elles font appel à plusieurs paramètres complexes et on a vite fait de tomber dans le bullshit en tentant d’y répondre.
Et pourtant, on a en France une entreprise qui a réussi à apporter des réponses à ces trois questions, à bien plus encore d’ailleurs, et qui se soucie plus de son “Human Plan” que de son “Business Plan”.
Aujourd’hui, j’avais envie de vous parler de Clinitex, une entreprise de nettoyage basée à Lille, qui compte + 4000 collaborateurs répartis dans 18 agences.
Edouard Pick est aujourd’hui le directeur général de Clinitex, créée par son père, et la façon dont il est arrivé là est déjà intéressante.
Il n’était pas prédestiné à reprendre l’entreprise, Edouard avait commencé sa carrière dans le conseil, et puis sur son temps libre il jette un œil à l’entreprise de son père, mène son audit pour regarder ce qui pourrait être amélioré. Et quand il présente ses idées au comité de direction, on lui propose de rejoindre l’aventure. Après avoir fait le tour des différents postes pendant quelques années, il finit par en prendre la direction, puis la racheter à son père.
Edouard a suivi un cursus scolaire inspiré de l’école Montessori qui met en avant l’autonomie, la responsabilisation, la confiance, et l’apprentissage en continue et surtout l’évaluation qui ne repose pas sur la performance mais le bonheur.
Alors quand il arrive dans l’entreprise, il met en place ces principes dans le management. Et aujourd’hui, un des indicateurs clés pour vérifier la pertinence du modèle est le bien-être des collaborateurs. (On va revenir sur le “comment”).
La vision se résume en une phrase “rendre le monde plus beau” et rassemble autant l’ambition auprès des clients (des bureaux plus propres) que des membres en interne (des salariés plus heureux.)
Quand on lit “rendre le monde plus beau”, normalement ça allume quelques red flag, parce que c’est exactement le genre de jolie phrase qu’utilisent de nombreuses entreprises qui ne rendent pas du tout le monde plus beau, alors qu’est-ce qui fait que c’est réel et que ça s’incarne dans le quotidien de chacun ?
Confiance et autonomie
Tous les trimestres, chaque membre est sollicité pour noter sur une échelle de 1 à 5 l'incarnation des valeurs. Si la moyenne est mauvaise, les agences doivent alors mettre en place des actions pour agir et faire remonter ces notes aux prochaines évaluations. La déclinaison des valeurs est propre à chaque métier car les comportements attendus ne sont pas les mêmes chez un agent de propreté ou un comptable.
Le niveau de bien-être est mesuré par un cabinet indépendant qui interroge 500 agents de propreté chaque année. La dernière enquête a montré 86% de membres heureux ou très heureux.
Côté management, la structure est horizontale, les directeurs d’agence s’occupent des équipes opérationnelles à travers une posture de coachs. Leur rôle consiste à animer les équipes, partager des expériences, mettre en lien les bonnes personnes…
Et les collaborateurs sont invités à s’auto-évaluer pour faire preuve d’autonomie, se rendre compte de ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, pour ainsi sortir de la relation classique de dominant et de dominé.
Chaque collaborateur partage ensuite sa propre évaluation aux personnes de son choix dans l’entreprise : un pair, une personne du siège, un collaborateur travaillant dans une agence…
Et là où c’est assez déroutant, c’est que ce temps d’échange n’aboutit pas à un feedback, le simple fait d’avoir présenté son auto-évaluation à quelqu’un permet à chacun de mettre en exergue les éventuelles failles. Il est ensuite demandé à la personne de prendre un engagement pour l’année à venir.
Jusqu’ici, tout me paraît cohérent par rapport à d’autres entreprises qui valorisent la confiance et la responsabilisation, mais je m’interroge sur le fait de ne passer que par l’oral et de ne pas conserver de trace écrite de ces échanges.
L’élément perturbateur vs le groupe
Le phénomène est le même partout, 95% des gens ne se lèvent pas le matin pour emmerder le boite, et pourtant ils subissent les règles qui sont en place pour les 5% qui perturbent le groupe.
Une anecdote résume à elle seule la position d’Edouard sur le sujet.
Chez Clinitex, les notes de frais sont transparentes. Pas de barèmes, pas de vérifications, pas de contrôle strict. Juste de la confiance.
Mais il y a quelques mois, un nouveau directeur d’agence a abusé de cette confiance. Il a manipulé son équipe en invitant certains au restaurant pour des déjeuners fastueux, très régulièrement… Le tout, aux frais de l'entreprise.
Entrée - plat - dessert - apéro, et il a fini par cumuler 8000 € de notes de frais en 4 mois, c’est plus que toutes les agences réunies en une année !
Comme il n’y a pas de mécanismes de contrôles, il faut un petit moment pour qu’un voyant rouge ne s’allume et que l’histoire arrive aux oreilles d’Edouard. (à travers une salariée de retour de congé maternité qui hallucine en retrouvant son équipe).
Alors que faire dans cette situation ?
“On met fin rapidement à la collaboration avec ce collaborateur. Ça a permis de beaux débats de recentrage sur les valeurs avec le groupe en question qui était à la fois acteur, mais aussi victime. Et ils ont eu l’humilité de reconnaître qu’ils sont tombés dans le panneau.
Après cette histoire, mon premier réflexe a été de me dire : on va remettre des barèmes et remettre du contrôle. Sauf que ça aurait été une lourde erreur. Si j'avais fait ce choix, j’alignais les 200 personnes qui ne trichent pas sur ce tricheur...
Attention à vos process : ne pas niveler les gens honnêtes sur les gens malhonnêtes. Si vous faites ça, vous créez une présomption de triche et abaissez le niveau de confiance de tous.”
Et on aurait pu s’en douter, mais une autre bonne pratique est en place : la transparence des salaires, chaque salaire est accessible à tous les membres de l’entreprise, et le ratio entre celui du dirigeant et le salaire le plus faible n’est que de 1 à 8 ! Edouard a tenté d’aller plus loin encore en laissant chacun choisir librement son salaire, mais il y avait trop d’incohérences pour conserver le modèle.
Le Human plan pour remplacer le Business plan
Si on est un peu honnête, on est tous d’accord qu’un business plan n’a jamais fait rêver personne, on peut faire dire à peu près ce qu’on veut aux chiffres, et ce n’est pas réellement un Excel qui engage les collaborateurs, aussi beau et détaillé soit-il.
Edouard tente plutôt de rassembler les membres autour d’un Human plan, en créant notamment une académie des souhaits et rêves professionnels dont le but est de les faire réfléchir à leurs propres leviers de motivation et leurs envies d’évolution professionnelles en leur mettant à disposition du contenu introspectif, des études graphologiques, en organisant des rencontres. Ce faisant, chacun a cheminé sur ses propres envies, ses ambitions personnelles, et Clinitex a doublé son nombre d'agences. Pour Edouard, cet objectif ambitieux n’aurait pas pu être atteint avec un seul Business Plan.
Et maintenant une bonne nouvelle
Il y aurait 1000 autres sujets à évoquer, mais le mieux c’est qu’Edouard nous en parle de vive-voix, et pour ça, j’ai une excellente nouvelle à vous annoncer.
Edouard Pick sera sur la scène de la WIP Expedition Night pour une carte blanche.
Il nous partagera toutes les bonnes pratiques qui lui ont permis de mettre au point ce modèle singulier chez Clinitex. Sans trop m’avancer, je peux déjà vous dire que c’est une keynote qui va vous marquer si vous êtes présent.
La soirée se passe le 4 février à 20h.
Elle est déjà sold out, 1000 mercis pour la confiance, vous avez été super vifs, les places sont toutes parties en quelques jours, et même, en 1h pour les 100 earlybird ! Vous êtes géniaux !
→ Pour ceux qui n’ont pas pris de place, vous pouvez vous inscrire sur la liste d’attente, s’il y a des désistements (et il y en a toujours quelques uns), on libérera des places au fur et à mesure. Et surtout, vous serez les premiers au courant des prochains événements de WIP qui arrivent dès le mois de mars !
News 🔥
Bon et les news ! Je rentre à l’instant du Japon, après deux semaines fascinantes.
J’ai passé ces derniers jours avec les personnes qui vivent déjà aujourd’hui la transition démographique à laquelle nous ferons face dans quelques années en France, avec ceux qui réfléchissent à l’impact du vieillissement de la population sur le travail : entreprises, ministère du travail, associations, et évidemment travailleurs de différents métiers.
C’est l’un des sujets de société qu’on a choisi de creuser dans notre prochain documentaire.
On rentre avec tellement de matière qu’il y aurait de quoi faire un format entier uniquement sur ce sujet ! Je suis curieux, quelles sont les entreprises / personnes / organisations, qui, aujourd’hui en France, réfléchissent à la façon dont les +60 ans continuent à travailler ?
Et maintenant on arrive dans la dernière ligne droite du montage, l’enjeu est d’intégrer ces nouvelles séquences dans la structure du documentaire, déjà bien avancée, et peaufiner jusqu’à la sortie !
Entre deux journées derrière l’ordinateur, je lève la tête pour faire quelques interventions en entreprises, la plupart en ce moment sont dans des cadres privés? Mais je vous donne rendez-vous dans une semaine à HR Technologies France, les 29 et 30 janvier, où j'animerai notamment une session avec Lucca. Le thème officiel du salon cette année "L'inattendu, c'est maintenant !", est en plein dans le sujet exploré dans notre prochain documentaire, alors j'en profiterai pour partager et décrypter quelques extraits exclusifs.
Ne manquez pas ce rendez-vous incontournable pour les professionnels des RH, du recrutement, et de la gestion des talents. Inscriptions gratuites ici.
Et pour programmer un événement ensemble cette année, c’est par ici.
Tes cadeaux pour te remercier de partager le Billet du futur
Pour rappel, si vous recommandez le Billet du futur à d’autres personnes, je vous offre des cadeaux !
1 recommandation : Je vous envoie un épisode de podcast privé de 15’ dans lequel je partage quelques convictions sur le travail.
10 recommandations : Je vous invite à l’avant-première de mon prochain documentaire
25 recommandations : On s’appelle 30’ pour parler de ce que vous voulez !
Il vous suffit de cliquer sur le bouton ci-dessous pour obtenir votre lien personnalisé.
Corner WIP
Vous n’avez pas eu votre dose de Work in Progress ? Passons une heure de plus ensemble. 🤗
Visionnez mon premier documentaire, Work in Progress (2021)
Visionnez mon deuxième documentaire, Why do we even work? (2022)
Visionnez mon troisième documentaire, Time to Work (2023)
Visionnez mon quatrième documentaire, AI at Work: who runs the office? (2024)
Lisez la Bande Dessinée Et si on travaillait autrement ? (2022) et sa grande sœur "Mais pourquoi j’irais travailler ?” (2023)
Et surtout écrivez-moi vos retours, ils sont précieux pour la préparation des prochains projets.
Bonne journée ! 🌞
Toujours très intéressante cette letter.
L’expérience Clinitex est surprenante mais efficace grâce à la confiance envers les autres. Félicitations pour la réussite de l’animation parisienne.