La quête de sens n’est pas un truc de riche
Billet du futur #85 : Time to Work est en ligne, rendez-vous au cinéma et en ligne !
Bonjour à toutes et à tous,
J’espère que vous êtes en pleine forme, de mon côté c’est une semaine que j’attends avec impatience puisque c’est la sortie de Time to Work !
Ce soir, il sera diffusé lors d’une avant-première avec nos partenaires et des médias. Et dès demain, le documentaire sera en ligne partout dans le monde !
C’est un moment tout particulier, après 12 mois à faire grandir ce projet, celui-ci ne nous appartient plus, chacun va se l’approprier, en discuter… Je vous propose de vivre ce moment ensemble en découvrant Time to Work sur grand écran.
Demain, mardi 4 avril, il sera projeté au cinéma Mk2 à 20h dans une salle de 300p. J’y serai avec toute la team du film, et il reste quelques places.
Bonne lecture,
Sam
Qu’est-ce que la quête de sens ?
Dans une discussion sur le futur du travail ou la quête de sens, il y a toujours au moins une personne pour dire, en substance, “oui mais la quête de sens c’est réservé aux CSP+, c’est un truc pour les riches qui ont du temps pour se poser ces questions.”
J’ai toujours pensé le contraire, et j’ai eu parfois du mal à expliquer mon sentiment sur le sujet. Au fil des rencontres et des discussions lors des tournages de ces trois documentaires, dans plein d’industries et de métiers, j’ai eu l’occasion de renforcer mon avis sur la question.
Non, la quête de sens n’est pas un truc de riche.
Qu’est-ce que la quête de sens ?
Déjà, mettons-nous d’accord sur ce qu’est la quête de sens. On a tendance à associer deux concepts bien différents : la recherche d’un sens personnel, et la recherche de l’impact. En passant par l’anglais, on comprend mieux ces deux idées distinctes qui se cachent derrière l’expression quête de sens :
Le sens personnel : C’est ce que l’on pourrait traduire par meaning. C’est l’idée que nous pouvons donner personnellement un sens à nos actions, c’est quelque chose qui ne regarde que nous, qui est très différent d’une personne à une autre. Concrètement, on a du sens quand à la fin de la journée, on est satisfait du travail accompli, pour plein de raisons différentes, mais pas nécessairement parce qu’on a été utile ou qu’on a eu un impact positif.
Le sens collectif : C’est ce que l’on pourrait traduire par impact. Toute action a un impact, positif ou négatif. Évidemment, on a envie de maximiser l’impact positif de ses actions. Concrètement, on a du sens quand à la fin de la journée on ressent un sentiment d’utilité lié à l’impact positif généré par son travail.
Ce qui nous intéresse dans cette quête de sens, c’est bien le sens personnel que l’on donne à son travail. Le sens collectif, compris comme l’impact, est bien trop lié au métier ou au secteur pour que nous puissions en tirer un raisonnement général. Il est tout de même amusant de noter que bien souvent, la plupart des métiers qui ont un impact positif sont occupés par des personnes mal payées, mal reconnues alors que les métiers qui ont un impact négatif sont généralement bien rémunérés et gratifiants.
Dans le documentaire Why do we even work? nous nous sommes penchés sur les différents leviers de motivation qui donnent du sens à notre travail. Bien que nous ayons tous des sensibilités différentes qui nous poussent à rechercher plus ou moins certains critères, nous pouvons rassembler les leviers de motivation en 3 grandes catégories :
L'environnement de travail : les liens sociaux noués, la flexibilité, les avantages accordés par l'entreprise, l'organisation du travail…
La tâche en elle-même : les différentes tâches réalisées au sein de l'entreprise et la façon dont elles sont réalisées : autonomie, responsabilité, créativité, apprentissage
La mission de l'entreprise : le sentiment d’utilité, le fait de contribuer à une mission qui nous dépasse et l'alignement entre nos valeurs personnelles et les objectifs de l'entreprise.
En acceptant cette définition de la quête de sens, on comprend que chacun, peu importe son métier, son secteur, son niveau de rémunération, puisse trouver du sens dans son travail. Pour certains c’est la tâche en elle-même qui sera le levier de motivation principal, pour d’autres ce seront les relations avec les collègues, ou encore le sentiment de contribuer à une mission importante d’intérêt public, ou encore un savant mélange d’un peu tous ces leviers.
Mais alors, d’où vient cette idée que la quête de sens est réservée aux riches ?
Ceux qui cherchent le plus à donner du sens à leur travail exercent une activité complexe qu’on peut qualifier de bullshit job.
“Un bullshit jobs est un travail rémunéré qui est si inutile, dispensable ou nuisible que même ou l’employé ne peut justifier son existence, même si elle ou il se sent obligé de prétendre que ce n’est pas le cas.” David Graeber
Le métier est si complexe qu’il est difficile à comprendre, au bout d’un moment la personne perd ses repères et cherche à se reconvertir. Et bien souvent, elle s’oriente vers un métier manuel, là où le sens et l’impact sont évidents et immédiats.
On ne manque pas de témoignages de diplômés de grandes écoles, qui, après des années à exercer un métier dans un bureau, troquent le costume pour un tablier et veulent renouer avec l’utilisation de la main, ils veulent vivre comme des artisans ! Et au diable la perte du “confort” longtemps idéalisé, désormais c’est le sens qui prime !
Ainsi, c’est peut-être parce que ce sont ceux qui exercent des bullshit jobs et qui s’intéressent le plus à la quête de sens, que l’on dit que c’est un truc de riche. Mais ça ne veut absolument pas dire que les personnes qui exercent des emplois mal payés, précaires et dévalués n’ont pas droit au sens dans leur travail, bien au contraire.
Prenons l’exemple d’un métier qui, dans l’imaginaire est certainement le moins attractif, et dont nous nous sommes collectivement rendus compte de l’importance ces dernières semaines : éboueur.
Le métier de ripeur n’est pas attractif pour deux raisons principales :
le salaire est faible.
il s’agit d’un métier pénible, d’abord il faut travailler la nuit, les horaires sont contraignants et les travailleurs sont exposés à de mauvaises odeurs, à des bruits répétitifs et une forte pression sur le respect d’horaires tendus.
Et malgré ces contraintes, les éboueurs ont conscience de l’importance de leur travail. La propreté, la qualité de vie et même la santé des quartiers dans lesquels nous vivons dépendent de ce métier essentiel. Il n’y a qu’à voir l’état d’une ville après quelques jours de grève pour s’en rendre compte.
Les éboueurs ont pleinement conscience de l’utilité publique de leur travail, le sens de leur activité est immédiat.
De la même façon, dans Time to Work, j’ai rendu visite à une autre profession dévaluée, les infirmières. Elles aussi ont hautement conscience de l’importance de leur rôle dans la société, c’est même ce sentiment d’utilité publique qui fait que nos hôpitaux, maisons de retraites, et domiciles des plus fragiles ne sont pas complètement vidés des soignants. Le sens évident de leurs activités est un des principaux leviers de motivation qui les aident à tenir dans les moments les plus difficiles.
Et c’est justement ce sens, qui est si évident et immédiat pour ces métiers, qui, de façon très malsaine a été utilisée dans les négociations pour payer moins ceux qui les pratiquent. Sous entendu : “tu as déjà du sens, tu ne vas pas en plus demander un bon salaire et des conditions de travail décentes ?!”
Face à ce constat, que pouvons-nous faire ?
Premièrement, mieux rémunérer les métiers les plus difficiles car ce sont aussi ce dont nous avons collectivement besoin qu’ils soient les plus attractifs.
Réfléchir à des façons créatives pour rendre l’environnement de travail, et les tâches moins pénibles, et c’est possible ! Sur le sujet des infirmières, on en parle dans Time to Work.
Ce n’est pas parce qu’un métier est alimentaire qu’il est dépourvu de sens. C’est même bien souvent le contraire. Peut-être faut-il alors faire la différence entre ceux qui exercent un métier qui a déjà intrinsèquement du sens (bien souvent les métiers les plus dévalués) de ceux qui recherchent du sens.
News 🔥
La nouvelle de la semaine, c’est la mise en ligne de Time to Work !
Vous pourrez le visionner dès mardi minuit en ligne sur Vimeo. Il sera aussi dispo dans les prochains jours sur les plateformes : en France sur Spicee et partout dans le monde sur Curiosity Stream (comme les deux précédents) !
On a choisi Paris pour partager ce moment unique de sortie du documentaire ensemble.
Demain 20h, mardi 4 avril on sera avec toute la team du film au Mk2 pour le dévoiler sur grand écran. Si vous voulez participer, c’est le moment de prendre votre place. (30 places restantes)
On ira aussi cette semaine à Lyon et Bordeaux pour le projeter mais les séances sont déjà complètes. Vous pouvez vous inscrire sur liste d’attente si des places se libèrent.
Et à partir de la semaine suivante, je démarre les projections privées en entreprises, écrivez-moi pour programmer une session ensemble.
Au milieu de cette dernière ligne droite avant la sortie de Time to Work, je me suis posé pour répondre à une dizaine de questions dans un podcast solo. Une bulle de 30’ pour prendre du recul et partager mon ressenti sur les trois années écoulées.
Je mets de temps en temps en avant des produits et services qui intéressent les +3000 lecteurs du Billet du futur, pour devenir parrain d’un prochain billet, c’est par ici.
Corner WIP
Vous n’avez pas eu votre dose de Work in Progress ? Passons une heure de plus ensemble. 🤗
Visionnez mon premier documentaire, Work in Progress (2021)
Visionnez mon deuxième documentaire, Why do we even work? (2022)
Lisez la Bande Dessinée Et si on travaillait autrement ? (2022)
Et surtout écrivez-moi vos retours, ils sont précieux pour la préparation des prochains projets.
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Bonne journée ! 🌞
J’ai hâte. Je me le réserve quand je serais au calme, frais et dispo.