Valoriser le processus plutôt que le résultat final
Billet du futur #88 : On n’est pas des robots, nouveau podcast, nouveau projet et une invitation !
Bonjour à toutes et à tous,
J’espère que vous êtes en pleine forme ! Cette semaine j’avais envie de vous parler de plusieurs sujets sans savoir me décider. La lecture d’un post LinkedIn et combiné à des emails de prospection reçus coup sur coup m’ont décidé à trancher !
Il est grand temps de valoriser le processus plutôt que le résultat final !
Bonne lecture,
Sam
Valoriser le processus
Tout au long de l’année, et particulièrement ces derniers jours, j’ai beaucoup été démarché par toutes sortes de freelances et agences me proposant d’optimiser mon temps de travail en automatisant certaines tâches ou en en délégant d’autres.
Et effectivement, il existe toute une batterie d’outils et quantités de personnes prêtes à me remplacer pour effectuer certaines tâches qui m’occupent au quotidien, souvent en échange d’une somme d’argent assez modeste par ailleurs.
Cette idée qu’il faudrait automatiser ou déléguer tout ce qui peut l’être au sein de son activité est répandue parmi les solopreneurs. Celui que beaucoup d’indépendants considèrent comme le pape en la matière, Thibault Louis, appelle à “se virer de son propre job”.
Vous vous en doutez, ce n’est pas une idée qui m’enthousiasme beaucoup ! Bien que je délègue quelques tâches et en automatise certaines, je ne crois pas qu’il faille viser l’optimisation de son temps de travail à tout prix.
Ce n’est pas parce que l’on peut que l’on doit. En 2023, il existe certainement un produit qui réponde à n’importe lequel de vos besoins et pourrait vous faire gagner du temps sur de nombreuses tâches. Et si ce n’est pas un produit, une autre personne pourrait certainement s’en charger.
Mais dans le travail comme dans beaucoup d’autres aspects de la vie, le plus important n’est pas le résultat, c’est le processus. C’est dans la réalisation d’une multitude de tâches que l’on obtient de l’apprentissage, de la reconnaissance, du lien social, un sentiment d’utilité…
Le vrai défi est d’identifier ces tâches qui nous permettent de nous réaliser et de continuer à prendre du plaisir dans leur exécution ! Et bizarrement, ce ne sont pas toujours les tâches jugées les plus stimulantes intellectuellement.
Par exemple, je suis ravi d’utiliser un outil comme Magical pour envoyer des réponses standards sympas sans avoir à réfléchir à des demandes récurrentes, mais je prends du plaisir à répondre et rédiger des emails originaux seul.
De la même façon, je suis bien content d’avoir délégué toute ma comptabilité à un cabinet mais j’aime conserver le fait d’éditer et envoyer moi-même mes devis et factures. Un petit bout d’administratif et de gestion que j’aime bien car il fait partie intégrante de la relation clients.
Ou encore cette newsletter : une fois le contenu écrit, je pourrais déléguer sa mise en ligne sur Substack, la recherche d’illustration, la préparation de déclinaison en post LinkedIn… et je gagnerais probablement une trentaine de minutes, mais ce sont des tâches qui font partie du processus à part entière, et dans lesquels je trouve du plaisir.
Et puis une bonne partie de mon activité ne se résume pas à l’écriture mais correspond plutôt à de la gestion de projet pour organiser les tournages, le montage, la sortie et la promotion des documentaires… Des tâches qui ne semblent pas nécessairement épanouissantes sur le papier mais dans lesquelles je trouve du plaisir, car elles font partie intégrante du processus de création du documentaire et dont la mise en ligne n’est que le résultat final.
A ce sujet, j’aime beaucoup la citation de James Suzman qui rappelle que peu importe notre activité, nous pouvons y trouver du plaisir :
“Nous travaillons pour vivre et nous vivons pour travailler et nous sommes capables de trouver du sens, de la satisfaction et de la fierté dans presque n’importe quel emploi, qu’il s’agisse de passer la serpillière sur le sol d’un geste monotone ou de concocter de subtiles niches fiscales.” James Suzman
L’IA s’en fiche du processus
L’Intelligence Artificielle est déjà en train de s’immiscer dans de nombreux pans de nos vies, et nul doute que dans quelques années, l’IA sera partout. Elle nous permettra d’accomplir plus rapidement et souvent mieux beaucoup de tâches routinières que nous effectuons, parfois pénibles et ce sera pour le mieux, parfois pas.
Dans un monde où l’IA est partout, il est plus que jamais essentiel de se rappeler que ce n’est pas seulement le résultat final qui a de la valeur, mais tout le processus pour en arriver là, ce dont l’IA s’en fiche.
L’IA n’ayant ni conscience ni émotion ne valorise pas le processus et se contente de nous mener directement au résultat. Et c’est là toute notre singularité, notre humanité, c’est notre capacité à accorder de la valeur à une activité simplement pour ce qu’elle est et pas seulement pour ce qu’elle produit.
Valoriser le processus, c’est se demander pour chaque tâche si nous avons un intérêt à l’exécuter ou si nous ne valorisons que le produit de cette tâche.
C’est en se posant la question avant de machinalement déléguer la tâche à une IA que l’on se permet alors de s’en servir comme un outil choisi, plutôt que de subir son intégration totale dans notre quotidien.
Je suis profondément optimiste à l’idée que nous développions des IA capables de nous compléter et de nous remplacer dans l'exécution de tâches de plus en plus nombreuses. Mais l’arrivée de l’IA n’est une bonne nouvelle qu’à la condition que nous conservions notre capacité de choix dans son usage et ne cédons pas à la tentation facile de s’en remettre à elle en toute situation.
Je rejoins complètement la vision formulée par Gaspard Koenig dans son livre Voyage d’un philosophe au pays de l’intelligence artificielle. Après quelques mois de learning expedition pour s’interroger sur la place de l’individu, des libertés et du libre arbitre à l’ère de l’IA, il en conclut ceci :
“Il faut le redéfinir et l’assumer d’un point de vue métaphysique et réaffirmer que ce qui est important, c’est la délibération intérieure, même si celle-ci est déterminée. Les gens doivent pouvoir introduire des critères explicites, conscients, au sein des algorithmes, même si ces critères explicites sont sous-optimaux pour eux-mêmes et pour le reste du groupe, peu importe. On ne peut pas maximiser le bonheur de tous, car le bonheur est une définition individuelle. C’est pour cela qu’il faut réhabiliter la singularité individuelle contre le confort du groupe. Bien évidemment la singularité individuelle provoque de l’inconfort, du malheur et de la souffrance, mais assumons-le.” (Extrait de cette interview)
Valoriser le processus autant, voire plus que le résultat final, c’est la doctrine des artisans. Et pour mieux saisir l’idée, je ne peux que vous renvoyer vers le témoignage de Peter, l’artisan de Chamonix qui fabrique des skis en bois dans le documentaire Why do we even work?. Il explique avec passion qu’il aime chaque étape de la création : de la sélection de l’essence de bois, la découpe, le ponçage, jusqu’à la remise en main propre au client, en passant par le balayage des copeaux de bois tombés au sol lors des différentes étapes. La création d’une paire de ski, c’est cet ensemble de tâches.
Le succès ne se trouve pas uniquement dans l’optimisation, la rente et la réduction du temps de travail. Tout comme le plaisir ne se trouve pas uniquement dans l’oisiveté et les loisirs.
En accordant plus d’importance au moment présent, en valorisant l’action, en mettant dans chaque tâche un bout de soi, c’est là que nous sommes capables de trouver du plaisir et du sens dans n’importe quoi. Peu importe à quel point la tâche peut sembler futile dans l’absolu, c’est à nous de lui donner de la valeur.
La prochaine fois que vous traiterez vos emails, plutôt que de penser à votre inbox zéro, pensez plutôt à ce que vous aimeriez que votre destinataire ressente lorsqu’il lira votre email. Sans prendre plus de temps, vous allez mettre beaucoup plus d'intentionnalité dans votre message, et je vous garantis que ce sera plus sympa à lire et à écrire.
News 🔥
Ces deux dernières semaines, j’ai passé le plus clair de mes journées à travailler sur le prochain projet Work in Progress : définir les angles, sélectionner les différents speakers, sélectionner les partenaires, creuser l’intention de réalisation avec la team KÖM… Un projet qui m’enthousiasme énormément et qui démarrera dès septembre !
Et après des journées passées plongé dans les réflexions et les recherches, je redescends sur terre pour animer des projections - débats de Time to Work en entreprises.
Je reçois beaucoup plus de demandes que les années précédentes et je ne suis plus en mesure de toutes les assurer, sans quoi je ne pourrai pas préparer les prochains projets. Mais c’est toujours avec une gratitude immense et beaucoup de curiosité pour les débats qui suivent le film que je partage ces moments-là.
L’agenda est déjà bien plein d’ici l’été, mais pour organiser un moment ensemble à partir de la rentrée, c’est par ici !
Un nouvel épisode de podcast est disponible avec Laetitia Vitaud ! En projection, on m’a posé une question qui m’a laissé sans voix : “Vous avez traité du temps POUR, mais qu’en est-il du temps DE ?” Et j’avoue, je n’ai rien compris. Heureusement, Laetitia n’était pas bien loin et elle a su me sortir de là brillamment. Et comme c’était une bonne question, on a décidé de creuser le sujet ensemble dans un épisode de podcast. Pour résumer il y a :
⌛ Le temps “chronos”, la durée, le temps que l’on maîtrise et que l’on mesure avec des montres, c’est le temps physique.
🏹 Le temps “kaïros”, le moment favorable, le deuxième sens du mot temps qui ne se mesure pas mais se ressent.
🪐 On pourrait ajouter le temps “aiôn”, le temps cyclique : les saisons, la respiration, le sommeil…
L’épisode dure 20’, il est disponible sur toutes les plateformes, par ici pour l’écouter !
Le jeudi 22 juin, je serai à Paris pour une projection - débat organisée par Parella autour du documentaire Time to Work. Ça se passe le matin sur un format petit dej dans le centre de Paris, pour s’inscrire c’est par ici (gratuit).
Bon plan ! Mon amie Jasmine lance avec Youth Forever son programme de formation CENO : un dispositif gratuit pour les 18-30 ans pour apprendre à convaincre, écouter, négocier et opérationnaliser pour lancer et cranter des projets à impact. Le concept : réunir et former 30 jeunes en 4 soirées (mardi 13, mardi 20, mardi 27 juin et mardi 4 juillet), de 19h à 23h (dîner inclus), chez August Debouzy dans le 8ème. Par ici pour candidater !
Corner WIP
Vous n’avez pas eu votre dose de Work in Progress ? Passons une heure de plus ensemble. 🤗
Visionnez mon premier documentaire, Work in Progress (2021)
Visionnez mon deuxième documentaire, Why do we even work? (2022)
Visionnez mon troisième documentaire, Time to Work (2023)
Lisez la Bande Dessinée Et si on travaillait autrement ? (2022) la suite est écrite, elle arrive dès cet automne !
Et surtout écrivez-moi vos retours, ils sont précieux pour la préparation des prochains projets.
Bonne journée ! 🌞