“Alors tes vacances, c’était bien ? Pas trop dur le retour au boulot ?” Si jamais vous en avez pris, peu de chances que vous échappiez aux questions de rentrée. ☀️
On a souvent l’habitude d’opposer les vacances au travail, de prôner la déconnexion et l’arrêt complet de toute activité professionnelle. Puisque l’on passe l’année à réfléchir au futur du travail, pourquoi ne pas profiter de l’été pour réfléchir au futur des vacances ?
Bonne lecture,
Sam
Tour d’horizon des vacances dans le temps et dans le monde
Avant 1936 en France, les congés payés ne duraient que quelques jours et étaient presque exclusivement réservés aux fonctionnaires d’Etat. Dans les entreprises privées, bien que deux semaines étaient réclamées par les syndicats, la plupart du temps les travailleurs essuyaient des refus de la part de leurs patrons. Au total, seulement 5% des parisiens bénéficiaient de congés payés avant 1936.
Cette année-là, le gouvernement du front populaire fraîchement élu permet à tous les salariés français d’obtenir deux semaines de congés payés. On estime que 600.000 personnes ont pu partir pour ces premières vacances en 1936, l’année suivante ils sont déjà trois fois plus et les zones touristiques commencent à se développer. 🏖️
En 1956 une troisième semaine est accordée puis une quatrième en 1969 et enfin la cinquième semaine de congés payés est légalisée en 1982, toujours en vigueur aujourd’hui ! Cette augmentation de la durée des congés payés s’est accompagnée d’une réduction du temps de travail quotidien maximal. Depuis 1975, le temps de travail a baissé de 17% !
Et qu’en est-il de nos voisins ? La France se classe parmi les pays les plus généreux au monde avec le Royaume-Uni, l’Autriche, la Suède, le Danemark...
Aux Etats-Unis les congés payés ne sont pas une obligation pour les entreprises, qui, en général accordent deux semaines à leurs employés. D’ailleurs, ces derniers ne les utilisent pas forcément ! Le Washington Post titrait en 2019 : What does America have against vacation?
Du côté des canadiens, seulement deux semaines de congés payés. Les pays asiatiques quant à eux, font partie des pays les moins généreux en termes de vacances. En Chine la durée des congés payés est corrélée à l’ancienneté : comptez 10 ans de salariat à temps plein pour bénéficier de 10 jours de congés payés.
Les congés payés sont caractéristiques du modèle de société du siècle passé, dominé par le salariat dans sa vision la plus traditionnelle. Pourtant, si le travail évolue, la remise en question d’une politique de vacances généreuse semble délicate et pas toujours souhaitable.
Si nous entrapercevons le futur du travail, qu’en est-il du futur des vacances ?
Cap sur les vacances du futur
Les congés payés, tels que négociés par les syndicats sont construits en opposition au temps de travail. Les vacances sont alors considérées comme des semaines de repos et de loisir pour contrebalancer des semaines de labeur le reste de l’année.
Cette dichotomie est une injonction au repos, à la jouissance et au temps consacré à soi durant les vacances, avec l’idée sous-jacente que ce sentiment et ces activités sont exclues du reste de l’année ou du moins qu’elles ne peuvent pas être majoritaires.
En bref : “Profitez bien de l’été, en septembre ça recommence !”
Le fait de sacraliser les vacances diabolise tout autant le travail effectué le reste de l’année.
Or, attendre les vacances pour profiter de sa vie et avoir des activités qui nous épanouissent, c’est comme attendre la fin de la journée de travail pour profiter de sa soirée ou la fin de la semaine pour profiter du week-end. Cela revient à accepter l’idée d’un travail aliénant excluant tout plaisir, qui ne serait qu’un gagne-pain, une vision du salariat à laquelle je n’adhère pas.
Heureusement, le travail évolue et pour un nombre croissant de travailleurs il n’est plus considéré comme seulement un labeur.
Que faisons-nous en vacances ? Nous prenons du temps pour nous-même, pour nos proches, pour profiter de nos amis, de nos familles, pour passer du temps avec les gens que nous aimons. Certains en profitent pour ralentir le rythme, entrent presque dans un état d’oisiveté tandis que d’autres en profitent au contraire pour redoubler d’activité et faire tout ce qu’ils aimeraient faire le reste de l’année : tourisme, sport, voyage.
Dans la représentation que l’on se fait des vacances, il y a l’idée de voyage, de partir, de quitter son domicile pour changer d’air, découvrir de nouvelles régions. 🚂
Dans l’optique, parfois intéressée, de se démarquer pour attirer et fidéliser les talents et créer la meilleure expérience employée possible, certaines entreprises ont opté pour les vacances illimitées ! C’est le cas de Netflix, LinkedIn ou en France OpenClassrooms et Alan par exemple.
Dans le cas d’Alan, la majorité des travailleurs prennent seulement 5 jours de plus que les 5 semaines habituelles. Le constat similaire a été fait chez OpenClassrooms qui a trouvé une bonne parade : une prime de 1000€ pour ceux qui poseraient trois semaines de vacances d’affilé !
“Nous avions constaté que les salariés s’auto-limitaient beaucoup. Alors que l’idée, c’était de leur permettre de prendre du recul pour revenir plus frais. La prime encourage cela.” Mathieu Nebra, cofondateur.
Les fondateurs l’ont bien compris, si l’idée des vacances illimitées est tentante, dans la réalité les salariés qui ont une charge importante de travail auront du mal à en profiter s’ils n’y sont pas explicitement encouragés. Nous ne sommes pas non plus à l’abris de tensions qui pourraient apparaître avec des débats internes sur la durée des vacances qu’untel aurait pris à un moment charnière de la vie de l’entreprise alors que ses collègues se limitaient.
Néanmoins l’idée des vacances illimitées est une évolution positive, elle accompagne l’idée, toujours plus présente, d’une meilleure prise en compte des aspirations personnelles et de l’équilibre vie privée-vie pro. Même si les travailleurs concernés ne partent pas en vacances toute l’année, d’autres innovations managériales accompagnent cette mesure et laissent aux salariés une bien meilleure liberté dans la gestion de leur vie.
Si les vacances sont l’occasion de prendre du temps pour soi, ses proches et son propre plaisir, pourquoi ne pas en profiter toute l’année ? Pas nécessairement sous forme de vacances, mais en adoptant un rythme de travail plus souple. En adoptant un style de management fondé sur la confiance, l’entreprise laisse le travailleur s’organiser comme il le souhaite afin d’atteindre ses objectifs, cela permet à chacun d’organiser son travail en fonction de sa vie et non plus l’inverse !
Bien évidemment, cette souplesse doit être discutée en interne afin qu’elle ne pénalise pas l’activité de l’entreprise et que l’absence ou le rythme d’une personne ne mette pas en difficulté le reste de son équipe.
A l’époque où il fallait travailler un nombre d’heure plus important pour avoir droit à plus de congés payés, la souplesse dans la gestion de son temps de travail séduisait déjà. Reportage Ina de 1979 !“Oh oui c’est pratique, on fait de son temps ce que l’on veut”
De la même façon, alors que nous cantonnons nos voyages aux vacances, de nombreux métiers pouvant désormais être effectués à distance, le télétravail devient une opportunité pour élargir ces temps de voyages à l’année complète. C’est la porte ouverte au nomadisme !
Enfin, et c’est la vision qui m’anime, pour aller au-delà du concept même de vacances illimitées, pourquoi ne pas tout simplement supprimer la notion de vacances. 😱
Pour les travailleurs indépendants, les congés payés n’existent pas, cela relève purement d’un arbitrage personnel : je travaille, je gagne de l’argent, je ne travaille pas, je ne gagne pas d’argent. Libre à chacun d’aménager son programme en fonction de ses besoins et ses aspirations entre les temps d’activité et les temps de non-activité.
Dès lors que j’aime mon travail, que je me réalise dans la plupart des tâches qui occupent mon quotidien et que je bénéficie de suffisamment de liberté pour organiser mon emploi du temps en autonomie, je n’ai pas besoin de vacances. Pourquoi faudrait-il à tout prix distinguer le temps de travail du temps de loisir ? Les deux peuvent tout à fait se chevaucher et leurs définitions se troubler : en fin de compte nous n’avons qu’une seule vie, il n’est pas nécessaire d’enfermer nos envies dans un rythme arbitraire : le week-end, le temps de travail, les vacances, ce ne sont que des conventions qui peuvent être dépassées.
Si l’on imagine bien la mise en place de cette vision pour des travailleurs indépendants, sa mise en place dans le cadre du salariat paraît plus complexe mais pas impossible. Elle nécessite un important degré de confiance, d’autonomie et une toute nouvelle façon d’envisager la relation employé-employeur.
Cette année, 71% des français répondent aux emails et coup de fils pros durant leurs congés, qu’on le veuille ou non, la frontière entre vie privée et vie professionnelle est déjà en train de s’effondrer. A nous de faire en sorte que cet effondrement s’effectue au service d’une meilleure autonomie plutôt qu’un degré plus important de contrôle.
Aiguisez votre regard sur le sujet 👀
JCK a partagé son rapport aux vacances depuis qu’il est entrepreneur dans sa newsletter personnelle.
Laetitia et Nicolas parlent du temps de travail dans cet épisode à deux voix de Nouveau Départ.
Interview Brut de François Baumann, spécialiste du burn out, au sujet de l’utilité des vacances : "Je pense qu'il vaudrait mieux avoir un rythme moins intense pendant l'année pour que les vacances soient réparties un peu différemment"
What is the importance of holidays? Il est intéressant de noter que la quasi-totalité des réponses à cette question sur Quora justifient les vacances comme un nécessaire repos après une dure année de travail et de stress … avant de recommencer.
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Bonne journée 🌞
> Pourquoi faudrait-il à tout prix distinguer le temps de travail du temps de loisir ? Les deux peuvent tout à fait se chevaucher et leurs définitions se troubler : en fin de compte nous n’avons qu’une seule vie, il n’est pas nécessaire d’enfermer nos envies dans un rythme arbitraire.
Je partage cette réflexion, mais néanmoins je pense qu'il manque deux notions fondamentales que tu n'abordes pas :
1. L'énergie. Travailler régulièrement, même à un rythme raisonnable, consomme à long terme beaucoup d'énergie, qu'il est difficile de récupérer par à-coups (ça dépend sûrement de l'âge aussi ^^). Une plus grande plage de vacances permet de mieux se ressourcer et de revenir beaucoup plus frais (et motivé) au travail.
2. Les interruptions. Le travail a son propre rythme (souvent la conjonction d'un groupe) qui fonctionne beaucoup par interruptions. Être identifié comme "en vacances" permet de se protéger sur des longues périodes de ces interruptions, et donc de se reposer, en particulier mentalement.
C'est pourquoi les longues plages de vacances sont très importantes je pense. D'ailleurs l'exemple de OpenClassrooms va un peu à l'encontre de ta conclusion : vacances illimitées oui, mais encouragement à bien séparer sa vie privée de sa vie perso (1000€ pour trois semaines posées).
Enfin, je crois que lorsque le privé et le pro sont mélangés, ou très proches, alors la dérive a beaucoup plus de chance de tirer vers le travail, car il y a une notion d'autorité (employeur, client, des abonnés qui attendent un service en bout de chaîne, ...). Les vacances permettent aussi de se protéger de cette autorité. Pendant les vacances, cette autorité n'a aucun droit. Donc, le repos n'en est que de meilleure qualité.