Comme certainement la plupart d’entre vous qui me lisez, je passe la plupart de mes journées derrière un ordinateur à lire et écrire des articles, à répondre aux emails, à préparer des interventions. Quand je ne suis pas en train de pianoter, je suis en réunion, en discussion. Finalement, je crée de la valeur du bout des doigts ou en parlant et le plaisir que j’en tire est complètement différent des activités de création et de transformation manuelles qui m’occupent généralement sur mon temps libre.
Aujourd’hui je me suis penché sur l’artisanat et la façon dont nous pouvons l’intégrer dans notre travail, quel qu’il soit ! Si le sujet vous est familier c’est que vous aussi avez dû lire l’excellent Du labeur à l’ouvrage de Laetitia Vitaud et si ce n’est pas fait, comptez sur moi pour vous le rappeler dans les recommandations en fin de billet.
Réveiller l’artisan qui sommeille en soi
Je n’ai jamais exercé de métier manuel et je ne suis pas non plus quelqu’un de particulièrement bricoleur. A vrai dire, j’ai toujours eu plein d’idées de créations mais j’ai souvent eu du mal dans la réalisation. Même si j’ai passé mon enfance à construire des cabanes en forêt, elles ne ressemblaient pas à grand-chose. Je me rappelle en revanche le plaisir que j’avais à planter des clous, scier des planches, peindre des palettes … J’y ai passé des journées entières.
Depuis que j’ai quitté le domicile de mes parents je me suis mis en tête de construire mes propres meubles : table basse, table de nuit, meubles à chaussures …
De la même façon je prends du plaisir à cuisiner, j’aime l’idée de transformer un sac de courses en une assiette appétissante et pleine de couleurs. J’ai l’impression que le plaisir qui naît de ces activités manuelles est complètement différent de celui que j’ai à rédiger un article, à donner une conférence ou à réfléchir à une stratégie de lancement d’un produit. J’aime beaucoup le fait de transformer la matière avec ses mains et de mettre ses muscles en action pour aboutir à un produit fini.
Comme bien souvent c’est un équilibre à trouver, la seule exécution manuelle ne serait pas autant appréciée si elle n’était pas couplée à une réflexion intellectuelle de conception. C’est la création artisanale dans son ensemble qui est vectrice du sentiment d’accomplissement.
La plupart du temps, lorsque nous prenons du plaisir dans nos activités intellectuelles soit il s’agit d’une interaction directe avec d’autres personnes, soit il s’agit d’une projection de l’impact de notre action. A l’inverse, le plaisir manuel vient de l'observation immédiate de notre impact. “Je suis content parce que j’ai transformé cette crème fraîche en panna cotta, je suis content parce que j’ai transformé ces quelques planches en une table basse.”
Quelles implications pour notre travail ? Sans que l’on quitte tous nos jobs pour devenir artisans, comment retrouver ce sentiment d’accomplissement dans nos métiers respectifs ? La clé réside certainement dans la capacité de chacun à intégrer dans son travail, quel qu’il soit, les caractéristiques de l’artisanat.
Intégrer l’artisanat dans son travail
“La crise de sens et l’ennui dont souffrent un nombre croissant de travailleurs salariés sont une aliénation qui peut trouver son remède dans les principes de l’artisanat.” Laëtitia Vitaud.
Laetitia explique que l’autonomie, la créativité et la maîtrise de l’impact de son travail, qui sont caractéristiques de l’artisanat, peuvent se retrouver dans de nombreux métiers que l’on ne considère pas comme artisanaux. Pour passer du labeur à l’ouvrage, il s’agit de s’approprier les principes de l’artisanat dans son quotidien.
Que l’on soit développeur, designer, consultant, RH ou que sais-je, il y a toujours une façon d’exercer son activité avec une meilleure conscience de ses actes, une meilleure attention portée aux détails, une dose supplémentaire de savoir-faire pour sublimer son action.
L’autonomie : Cette qualité devient essentielle maintenant que nous travaillons de plus en plus à distance. L’autonomie est la capacité à se mettre soi-même au travail aux horaires choisis, dans les lieux souhaités et d’agir sans demander d’approbations ou de vérifications à tout-va.
La créativité : C’est ce qui rend une action unique, pour le fond comme pour la forme. La créativité s’inscrit aussi bien dans l’ère du temps en nous faisant passer d’un travail standardisé correspondant à l’économie de masse du siècle passé, à un travail singulier, caractéristique de notre retour aux consommations locales et sur-mesure.
La responsabilité : Avoir la responsabilité d’une tâche donne de la visibilité sur le projet dans son ensemble. En étant responsable d’une activité, je comprends le sens de celle-ci et ses implications. La responsabilité nous rapproche de la notion d’impact de son travail.
L’empathie : Qualité cruciale en temps de crise, l’empathie peut parfois faire toute la différence, pas forcément dans le résultat mais dans la façon d’accomplir une tâche.
Dans son livre, Laetitia cite William Morris, initiateur des mouvements Arts & Craft pour qui tout travailleur doit produire de la beauté et pour qui l’art doit être partout, dans chaque objet. Elle écrit l’importance de prendre en compte le moment auquel William Morris est devenu une source d’inspiration, c’est à dire lors de l’essor de l’économie industrielle.
La crise que nous traversons a permis une remise en question inédite de notre économie globalisée en mettant en quelques jours en pause une machine que l’on pensait inarrêtable. Et lorsque l’on s’est tous retrouvés chez soi à s’interroger sur le sens de notre travail qui n’était pas toujours évident à trouver, des éléments de réponses étaient peut-être à chercher chez ces auteurs qui nous invitent à renouer avec les principes de l’artisanat. C’est en tous cas à ces conclusions que sont arrivées mes réflexions liées à la période, notamment sur l’importance de pouvoir mesurer facilement l’impact de ses actions.
Dans sa chronique pour HBR que je vous partageais dans l’édition précédente, John Coleman parle lui aussi du job crafting ; le fait de façonner son travail en injectant du savoir-faire dans la réalisation d’une tâche et d’avoir l’envie de s’appliquer à parfaire les compétences nécessaires à son accomplissement.
Les makers, nouveaux artisans
A leur façon, les makers sont l’incarnation d’une nouvelle génération d’artisans et apportent une dimension d’ouverture à leur oeuvre. Tous ne sont pas ingénieurs, beaucoup sont autodidactes et ceux que j’ai rencontrés avaient à coeur de transmettre leur savoir-faire de façon désintéressée et se s’ouvrir aux idées des newbies : on retrouve les mêmes valeurs dans les communautés Open Source.
Il y a un an tout pile en juin dernier, je découvrais l’espace de coworking MOB. MOB signifie Makers Of Barcelona, à l’origine il s’agissait d’un fablab créé par Cécilia dans un ancien hangar. Aujourd’hui MOB compte trois espaces de coworking répartis aux quatre coins de Barcelone mais qui conservent leur mission d’origine avec un fab café doté de plusieurs machines. Vous pouvez aller les voir avec vos idées en tête et le responsable de l’atelier vous aidera à les mettre en forme à l’aide des outils les plus adéquats à disposition, la seule limite : votre créativité ! Leurs utilisateurs ont de 6 à 87 ans et ont des projets variés : graver son nom sur un morceau de plastique ou imprimer une prothèse à des fins médicales.
Ces nouveaux artisans ont dernièrement joué un rôle dans la lutte contre le Covid, ils ont très rapidement levé des fonds pour passer des commandes de masques et acheter les matières premières leur permettant de créer divers objets à destination des hôpitaux : valves, “fendeurs” pour respirateurs artificiels … De la même façon on se souvient des masques Easybreath de Décathlon adaptés pour faire face au manque d'équipement des hôpitaux. Le DIY à la rescousse !
Aiguisez votre regard sur le sujet 👀
Les cadres qui se reconvertissent dans l’artisanat sont nombreux !“Après avoir passé des années à échanger des e-mails et des coups de téléphone, on a l’impression d’être devenu les maillons d’une chaîne dont on ne voit ni le début ni la fin. On a besoin de renouer avec le concret de la matière.”
Du labeur à l’ouvrage de Laetitia Vitaud.
Les makers à la rescousse : un article qui traite de la façon dont les makers espagnols ont réagi pendant la crise du Covid.
News 🔥
Cette semaine je suis à Grenoble, et j’ai l’impression que l’activité reprend gentiment partout autour de moi. A ce propos je passe de ma micro-entreprise à l’EURL, une petite étape dans une vie de freelance !
Je vous parlais d’Open Source plus haut, j’ai découvert cette semaine un projet formidable grâce à Greg de The Coding Machine : Workadventure. Des maps qui correspondent à vos bureaux dans lesquelles vous pouvez vous balader et échanger avec vos collègues comme si vous y étiez ! Si vous voulez voir à quoi ça ressemble, je serai en ligne aux autour de 10h ! C’est par ici !
La semaine passée j’ai testé un nouveau format en lançant un thread sur Substack et un tas de bonnes idées ont émergé. Nous en referons d’autres dans les prochaines semaines, en attendant je suis preneur de vos retours. La discussion est à retrouver juste ici : Télétravail : salaire local ou global ?
Vendredi j’étais en live avec Pauline du Collectif Cosme pour parler de l’expérience freelance en entreprise, le replay est dispo juste ici.
Laetitia a récemment publié un nouveau livre avec Jérémy de WTTJ : 100 idées innovantes pour recruter des talents et les faire grandir. J’en ai lu la moitié pour l’instant, le format est très agréable !
J’ai adoré le passage de Pierre Kosciusko Morizet dans le podcast GDIY : Arrêter de vouloir être le premier.
Documentaire 🎥
Si je communique encore peu, dans l’ombre tout s’active et ce projet concentre 90% de mon temps de travail.
Les nouvelles arrivent très vite 🧐
Je vous solliciterai d’ailleurs très prochainement pour m’aider à sélectionner le nom du projet. Si nous ne sommes pas encore connectés sur les réseaux c’est par ici : mon LinkedIn et mon Twitter.
Et voilà ! C’est tout pour aujourd’hui. Et maintenant je compte sur vous, le futur du travail ça ne se construit pas tout seul ! 🤷♂️
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